SOMMAIRE
CPS N° 68                                                                                                             13 JUIN 1997

À BAS CHIRAC !
 

À BAS LA VÈME RÉPUBLIQUE ET SES INSTITUTIONS !

POUR UN GOUVERNEMENT DU PS ET DU PCF SANS MINISTRE MEMBRE DE PARTIS BOURGEOIS !

POUR UN PLAN DE DÉFENSE DE LA CLASSE OUVRIÈRE
ET DE LA JEUNESSE !

Jacques Chirac a dissout l’Assemblée nationale pour que s’exprime le "suffrage universel". Bien que s’inscrivant dans un cadre fait sur mesure pour garantir la pérennité de la Vème République et de ses institutions, le "suffrage universel" a rendu son verdict :

À bas Chirac !

À bas la Vème République et ses institutions !

Pour un gouvernement du PS et du PCF sans ministre membre de partis bourgeois !

Les contradictions et les antagonismes déchirent la majorité RPR-UDF ainsi que la bourgeoisie confrontée à de redoutables problèmes : mise en cause de ses positions dans le monde, en particulier par l’impérialisme américain ; problèmes liés à l’Union européenne et à la mise en place de l’Union monétaire. Ainsi, Giscard et d’autres avaient protesté quand Chirac avait dû, en décembre 1996, se résoudre à signer, à Dublin, le pacte de stabilité, pacte dicté par l’impérialisme allemand qui prévoit des sanctions automatiques des États ne respectant pas les critères de Maastricht.

Chirac n’a pas vu d’autre issue que de dissoudre l’Assemblée nationale. Il estimait qu’à l’issue de nouvelles élections législatives, il disposerait d’une majorité strictement à sa botte lui permettant de fait d’exercer seul tout le pouvoir. Jusqu’à l’extrême limite, il s’est battu sur cette orientation. Le mardi 27 mai encore, il s’adressait à la télévision et à la radio à ses "chers compatriotes". Il rendait un vibrant hommage à A.Juppé ("Je tiens à rendre un hommage particulier au premier ministre") alors que ce dernier annonçait la démission de son gouvernement et renonçait à diriger la campagne électorale de "la majorité". J.Chirac appelait ensuite à voter pour la majorité en expliquant pourquoi il avait dissout l’Assemblée nationale.

"J’ai voulu en provoquant des élections, ressaisir l’énergie nationale pour entraîner et pour convaincre pour donner à la nation (en l’occurrence lui-même) une force qui lui échappait." La réponse est venue nette, brutale, indiscutable : la majorité RPR-UDF s’est effondrée

1993, nombre de députés : PCF : 23 ; PS et alliés : 70 ; UDF : 213 ; RPR : 247 ; Divers droite : 24

1997, nombre de députés : PCF : 37; MDC : 7 ; PS et apparentés : 245 ; PRS : 13 ; Verts 18 ; Divers gauche : 9 ; divers droite : 7 ; UDF et apparentés 109 ; RPR et apparentés : 139 ; LDI : 1 ; FN :1.

Le RPR et l’UDF sont laminés. La coalition PS-PCF-MDC-PRS-Verts, nouvelle appellation de "l’Union de la gauche" (coalition de type Front populaire) est largement victorieuse.

UN PROGRAMME DE DÉFENSE DU SYSTÈME CAPITALISTE

Chirac est totalement désavoué. Il s’accroche à la Présidence de la République, mais il est totalement dévalorisé, tant en France qu’à l’échelle internationale. Ses "adversaires" de la coalition PS-PCF-MDC-PRS-Verts loin de faire leurs les mots d’ordre ci-dessus se précipitent à son secours. Ils le maintiennent. Les résultats électoraux à peine connus, Lionel Jospin et Robert Hue répétaient : Jacques Chirac est le Président de la République avec toutes ses prérogatives. Pour que nul n’en doute, Jospin a respecté le processus de "désignation" du premier ministre par le Président.

Le premier souci de Jospin et de Hue a été d’affirmer la continuité de la Vème République, de sa constitution, de ses institutions réactionnaires et antidémocratiques. Désigné par le Président de la République, Jospin a formé son gouvernement. Outre le PS et le PCF, les Verts, les Radicaux socialistes, le Mouvement des citoyens de Chevènement en font partie ; Jospin l’a dit et redit, sur la base du programme du PS.

Il faut le dire nettement : ce programme est un programme de défense du régime capitaliste (le capitalisme "soft" aux dires de Jospin) qui s’appliquerait en cinq ans. Dans une tribune publiée par Libération du 16 mai, Jospin le résumait lui-même ainsi : "l’économie de marché est le cadre dans lequel nous inscrivons notre volonté de transformer la société".

C’est net et clair : "l’économie de marché", c’est le mode de production capitaliste dominé par "les marchés". Toutefois, poursuit Jospin : "Seul, le marché ne peut réguler toutes les questions qui se posent aux économies et aux sociétés contemporaines".

" Spontanément, il ne secrète pas l’ensemble des solutions adaptées aux enjeux du moment.

" La négociation, le contrat, la loi doivent lui fixer des objectifs, canaliser ses excès, pallier à ses insuffisances. De ces instruments, nous n’en privilégions aucun à priori. Nous ne sanctifions pas le marché, pas plus que l’État. Nous savons qu’ils ont besoin l’un de l’autre .Nous rejetons le dirigisme comme le laisser-faire. Nous restons volontaristes, parce que nous refusons de nous résigner. " Le marché est myope" a-t-on coutume de dire. Cette myopie se paie par du chômage. Spontanément le marché ne crée l’emploi que lentement et lorsqu’il le fait, c’est pour mettre en place une société duale, déchirée " Aussi Jospin se propose-t-il de redonner à l’État et au gouvernement un rôle économique pour "restaurer un partage équilibré de la richesse nationale qui profite à tous - salariés et entreprises-, renouer avec les conditions d’une croissance qui articule harmonieusement le profit et le salaire., le capital et le travail, l’offre et la demande".

POUR UN NOUVEAU PARTENARIAT SOCIAL : VERS LA COGESTION

Jospin se propose d’établir un partenariat social permettant la signature d’accords liant l’emploi et la flexibilité tels ceux qui se multiplient en Europe. Ainsi les accords signés, le 4 juin, par le syndicat allemand de la chimie prévoient qu’en cas de conjoncture difficile les salaires pourront baisser jusqu’à 10% au dessous des tarifs de branche. Le Monde du 7 juin publie une page d’articles présentant ces "nouveaux compromis sociaux" acceptés par les syndicats des pays voisins et mettant en cause les acquis ouvriers. Et de déplorer que la France soit un des rares pays où ce type d’accords reste exceptionnel tout en valorisant ces partes sociaux : "une démarche qui pourrait inspirer Jospin" !

C’est en effet, cette démarche que Jospin a adoptée ; pour mettre en place ce partenariat social prélude à la cogestion, il prévoit un calendrier politique qui devrait s’appliquer sur cinq ans :

"Seul un engagement de toutes les forces vives du pays permettra de réussir cette mutation : un pacte national est donc nécessaire".La conférence de l’emploi, des salaires et de la réduction du temps de travail que nous proposons et qui se réunirait aussitôt après l’indispensable audit des finances publiques, au mois de juillet, scellerait ce pacte. L’État désignerait le cap à tenir, celui du passage progressif aux 35 heures à la fin du siècle, sans diminution de salaire, grâce au vote d’une loi-cadre. Aux partenaires sociaux de négocier, dans le courant du second semestre 1997, branche par branche, entreprise par entreprise, le rythme et les modalités de cet accord. Nous ne proposons bien sûr pas "l’économie administrée" ni la "spoliation des entreprises", comme le prétend la droite. La réduction du temps de travail exige de la souplesse : à la négociation de le permettre. Et l’effort sera équitablement réparti. Les gains de productivité permettront de financer une part importante de ce mouvement. Les entreprises dont la situation financière le permet participeront, elles aussi, au financement du dispositif. L’État, dont c’est là le devoir, incitera les entreprises à s’engager résolument dans cette voie de la réduction négociée du temps de travail en allégeant leurs charges sociales. Quant aux salariés, ils conserveraient leur rémunération mensuelle pour un temps de travail allégé et accepteraient en contrepartie, une modération salariale. D’un côté, les anciens salariés gagneraient autant tout en travaillant moins ; de l’autre, les nouveaux salariés gageraient enfin leur vie en travaillant plus nombreux. Il y aura bien, au total hausse de la masse salariale : elle proviendra des nouvelles embauches. Des centaines de milliers d’emplois pourraient ainsi être créés." S’agit-il d’une réduction du temps de travail garantissant le maintien du pouvoir d’achat et les acquis ouvriers ? L’ouverture de négociations par branche, par entreprise montre qu’en fait, au nom de la diminution du temps de travail, l’objectif est d’introduire la souplesse, l’aménagement et la diversification du temps de travail ; cette diminution s’accompagne de fait d’une diminution de la valeur de la force de travail (diminution des charges sociales , c’est à dire du salaire différé et hausse de la productivité du travail liée à la flexibilité). C’est donc à la mise en cause des acquis ouvriers inscrits dans les Conventions collectives nationales que Jospin entend associer les organisations syndicales.

POURSUIVRE LA MISE EN CAUSE DES ACQUIS OUVRIERS

Vient ensuite l’objectif de créer 700 000 emplois pour les jeunes, Jospin poursuit :

"Prise en charge des personnes âgées - notamment dans le cadre du maintien à domicile -, accompagnement et soutien scolaires, sécurité de proximité, protection de l’environnement, encadrement sportif, etc. : des besoins considérables existent,(...). Les emplois ainsi créés ne seront en aucun cas des postes de fonctionnaires supplémentaires. Il s’agira, en revanche, de vrais contrats, d’une durée de cinq ans, offerts par les associations et les collectivités locales, assortis d’un vrai salaire. Ce dispositif n’augmentera pas la dépense publique puisque son financement, clair, sera gagé sur des économies. Compte tenu de la nécessaire montée en charge de cette mesure, son coût sera de 5 milliards de francs pour le second semestre de 1997 et n’excédera pas 13 milliards de francs en 1998. Ce n’est qu’à compter de la fin de l’année 1999, en régime de croisière, que 35 milliards de francs seront nécessaires pour financer ces 350 000 emplois. (...). C’est bien peu si l’on sait que, chaque année, l’État dépense 130 milliards de francs pour des aides à l’emploi trop souvent inefficaces - je pense, en particulier, au CIE. En simplifiant et en mettant fin à certaines de ces aides, nous dégagerons les sommes nécessaires au financement du dispositif (...)

Quant aux 350 000 emplois que nous nous fixons comme objectif dans le secteur marchand, nous inciterons les entreprises à les créer par des exonérations de charges sociales qui seront accordées si les embauches de jeunes sont avérées(...) Cet engagement passera, là encore, par la négociation.

Ce programme national pour les jeunes illustre ma conception du rôle de l’État. La droite dit vouloir réduire la dépense publique ; en fait, elle menace le service public. Nous ne souhaitons pas dépenser plus mais dépenser mieux. Le budget de l’État doit être réorienté vers l’emploi, vers des dépenses d’avenir - éducation, recherche, culture-, vers la solidarité- d’abord vers le logement social, vers la restructuration"

Solidement appuyé sur cette construction, Jospin considère qu’il va régler tous les problèmes. Sans aucun doute l’État et les collectivités locales ont les moyens de créer 350 000 emplois. Mais de quel type d’emplois s’agit-il ? "En aucun cas de postes de fonctionnaires supplémentaires". Il s’agirait donc de développer dans la Fonction publique et les collectivités territoriales une sorte de double statut : c’est aller vers une nouvelle mise en cause du statut de la Fonction publique. Par ailleurs, faire en sorte que le "secteur marchand" crée 350 000 emplois est une autre affaire. Il ne le fera que s’il y a intérêt et cela risque de coûter cher à l’État (voir la loi Robien).

CHÔMAGE ET MODE DE PRODUCTION CAPITALISTE

Mais surtout, ni Jospin, ni Robert Hue, ni Chirac n’indiquent la cause du chômage. Ils seraient obligés de dire que "c’est le mode de production capitaliste" et qu’il n’y a dans ce régime de création d’emplois, durable et valable, que pour autant que ces emplois accroissant et développent la production de la plus-value que le capital s’approprie, à condition toutefois qu’elle soit réalisée. La vraie question est donc : le plan d’intervention de l’État que se propose d’appliquer Jospin permettra-t-il qu’il en soit ainsi ? Historiquement, le mode de production capitaliste est dans l’impasse, quelles que soient les variations conjoncturelles, il ne peut finalement aboutir qu’à des catastrophes. C’est inéluctable. Ce qui n’empêche pas que se produisent des "croissances", des "prospérités" conjoncturelles. C’est une des contradictions actuellement en développement. Mais inéluctablement le mode de production capitaliste va engendrer une crise conjoncturelle. Alors crise historique et crise conjoncturelle fusionneront : l’économie, la finance, les rapports sociaux et politiques de toutes les nations s’effondreront

Cette échéance est inéluctable. Le plan Jospin, dans la mesure où il s’appliquerait, la préparerait plus brutale, plus profonde. Pour l’instant tandis que la crise, l’impasse historique du mode de production capitaliste est plus ou moins marquée, apparaît une situation conjoncturelle où le capital réalise de hauts taux de profit et on assiste plutôt à un élargissement de la production Encore faut-il souligner que ces taux de profit exigent, compte tenu de la concurrence internationale, que le capital intensifie l’exploitation. C’est ainsi que la valeur de la force de travail de la classe ouvrière diminue, que ses conditions de travail et de vie deviennent de plus en plus précaires, que ses conquêtes et ses acquis (Sécurité sociale notamment) sont remis en cause. En bref, il faut que soit réalisé en France et dans les autres pays de "l’Union européenne" ce que Reagan et Thatcher ont réalisé aux États-Unis et en Angleterre.

Au contraire de ce disent et croient nombre d’économistes distingués, la masse déjà énorme des chômeurs n’est pas un handicap mais un avantage pour le capital. Cela pèse lourdement sur la classe ouvrière et joue dans le sens de l’aggravation de son exploitation. Par ailleurs, compte tenu des acquis de la classe ouvrière, le chômage a un coût économique social et politique qui dépasse ce qui est supportable aujourd’hui. C’est pourquoi, pour la bourgeoisie comme pour tout gouvernement à son service, l’objectif n’est pas de réduire le chômage, mais de réduire son coût, ce qui est partie intégrante de la réduction de la valeur de la force de travail. Au nom de la soi-disant "lutte contre le chômage".

Finalement, la "prospérité" capitaliste actuelle est conjoncturelle. La logique de l’économie capitaliste prépare son effondrement. Alors ce seraient les rapports économiques, financiers, sociaux de toute sorte, qui se décomposeraient. C’est par dizaine et dizaine de millions que se compteraient les chômeurs. Voilà ce qui se prépare derrière la "prospérité" actuelle. Crise historique et crise conjoncturelle se rejoindraient et fusionneraient. L’alternative est simple, ou le mode de production capitaliste est renversé, le prolétariat prend le pouvoir, constitue un mode de production dont le moteur est la satisfaction des immenses besoins des masses et non plus le profit, ou c’est la catastrophe.

LA QUESTION DE L’EUROPE : TERRAIN DE COLLABORATION ENTRE L.JOSPIN ET J.CHIRAC

Lundi 9 juin, D.Strauss-Kahn, ministre des finances, de l’économie et de l’industrie a demandé un délai de réflexion sur le pacte de stabilité budgétaire et de croissance signé par J.Chirac lors du sommet de Dublin, en décembre 1996.

Le 21 mai dans un entretien au Monde L. Jospin affirmait :

"Le pacte de stabilité ajoute des conditions qui ne sont pas le traité de Maastricht. C’est du super-Maastricht et c’est une concession que le gouvernement français a faite absurdement aux Allemands (...) Donc je n’ai aucune raison de me sentir engagé par rapport à cela". Quelques jours après sa défaite, J.Chirac réaffirmait son pré-carré et l’orientation qui est la sienne, dans le discours qu’il prononçait le 7 juin à Lille à l’occasion du Congrès de la Fédération nationale de la Mutualité française : "Aujourd’hui, mon devoir c’est de présenter les acquis européens obtenus après quarante ans de patience et d’efforts et de continuer d’avancer malgré les obstacles vers une Europe forte et juste". De son côté, dans un entretien publié par l’International Herald Tribune, le 6 juin, J.Delors expliquait que le gouvernement Jospin serait au rendez-vous de l’euro mais qu’il insisterait pour une interprétation plus flexible des critères de Maastricht.

À Luxembourg, le 9 juin, D.Strauss-Kahn déclarait : "On ne souhaite pas renégocier le pacte, mais on ne souhaite pas l’approuver maintenant".

À l’évidence, pour le gouvernement dirigé par Jospin, l’Europe est une question immédiatement douloureuse : d’un côté, il doit faire face à un déficit budgétaire important, supérieur aux critères de Maastricht. Mais de l’autre, le refus du pacte de stabilité ferait voler en éclat le dispositif patiemment construit pour mettre en place la monnaie unique et le gouvernement ne peut en prendre seul la responsabilité ; de plus, un tel refus mettrait immédiatement en cause la signature de Chirac à Dublin, Chirac lui-même et les prérogatives de Président de la Vème République que L.Jospin et R.Hue lui reconnaissent.

Le 11 juin, interrogé sur les chances de voir le Pacte adopté à Amsterdam, J.Chirac déclarait : "Je le souhaite, je l’espère et pour tout dire, je le pense". Alors que le président de la Commission européenne proposait "un complément au Pacte de stabilité pour valoriser la coordination des politiques économiques des Quinze", D.Strauss-Kahn affirmait que "personne ne souhaite faire durer le plaisir" et que si l’on peut "avancer rapidement" vers un accord "c’est évidemment mieux". Devant le Bundestag, Klaus Kinkel annonçait que Bonn était prêt à accepter l’ajout d’un chapitre sur l’emploi dans le traité de Maastricht révisé. Il appartenait à Raymond Barre de caractériser cette capitulation en ces termes :

"Si l’on veut ajouter un codicille expliquant que les politiques budgétaires et économiques doivent être cordonnées pour servir la croissance et l’emploi, qui serait contre cela ? C’est déjà écrit dans le traité de Maastricht". Le Figaro du 13 juin peut alors titrer :"Chirac Jospin veulent parler d’une seule voix". C’est ce qu’a annoncé l’Élysée

L’UNION EUROPÉENNE EN DIFFICULTÉ

Si la question de l’Europe divise la bourgeoisie française, elle crée aussi des dissensions en Allemagne. Pour le capital financier, il est indispensable que le traité de Maastricht modifié soit ratifié. Un échec de l’UEM "déboucherait sur un nouvel affaiblissement de la place de l’Europe dans les questions internationales et conduirait à des antagonismes entre États européens" affirme le directeur des études économiques du groupe Deutsche Bank. Imposer que le gouvernement de coalition dirigé par Jospin se soumette au "code de bonne conduite budgétaire" que Chirac a dû avaliser à Dublin est une exigence impérieuse. Le Figaro du 13 juin en présente ainsi les enjeux :

" Un échec déboucherait sur le renvoi de l’Euro à d’incertaines calendes. C’est ce que demandent depuis longtemps, des deux côtés du Rhin, les adversaires de la monnaie unique. Reporter serait renoncer (...)

" Qu’adviendrait-il dans ce contexte des relations franco-allemandes ? Privées de l’objectif européen (...) elles ne seraient plus bientôt qu’une coquille vide, incitant l’Allemagne à organiser autour d’elle l’espace centre-européen, cette "Mittel Europa" où elle dispose de tant d’atouts.

" Quel échec ce serait pour la France ! Quelle faute pour le gouvernement qui en porterait la responsabilité. Une responsabilité historique ! Par bonheur, l’heure est la conciliation. "

À l’évidence, respecter le cadre de l’économie de marché, c’est se soumettre aux exigences du capital financier, c’est à dire au "Pacte de stabilité" signé à Dublin.

Cela dit, il apparaît de plus en plus que l’impérialisme français comme d’ailleurs l’impérialisme allemand sont incapables de respecter les critères de Maastricht.

RENAULT : "SOLUTION ALTERNATIVE" OU ANNULATION DE TOUS LES "PLANS SOCIAUX" ?

Jeudi 29 mai, L.Jospin déclarait que :

"Les représentants de l’État au conseil d’administration exigeraient que d’autres mesures soient envisagées, étudiées et préparées pour résoudre les difficultés qui peuvent exister en matière de coût de production de l’usine de Vilvoorde" Le 3 juin, la direction de Renault répondait que ni une baisse des salaires ni une réduction du temps de travail ne permettraient de réaliser autant d’économies que la fermeture de l’usine. Pour que celle-ci soit rentable il faudrait une réduction de 10% la première année, de 16% par la suite, ce qui est "difficilement réalisable" ; en outre, la direction estime qu’il faudrait une mobilité beaucoup plus grande des salariés.

Le 10 juin, le conseiller social de L.Jospin faisait l’annonce suivante : "le premier ministre se réjouit de ce qui a été annoncé pour Renault Vilvoorde, de la décision prise de prendre le temps de réaliser une étude indépendante pour rechercher une solution qui pourrait être alternative à la fermeture annoncée". De quoi s’agit-il ?

Le conseil d’administration de Renault a en effet demandé une "étude indépendante" qui "donnera une évaluation économique des mesures envisageables dans le cadre des lois en vigueur pour compenser le surcoût lié aux structures de production de Renault". Il a fait, pour cela, appel à un expert du cabinet Bernard Bruhnes Consultants qui devra rendre compte de ses travaux fin juin.

Indépendante, la société de conseil en management de Bernard Bruhnes ? Dans un ouvrage préfacé par J.Delors, ce "spécialiste" au service de la bourgeoisie considère que si l’on divisait par quatre l’épaisseur du Code du travail, il serait encore trop volumineux. Il prône la "mobilité professionnelle", la "mobilité géographique", la "souplesse du temps de travail" et la "flexibilité des salaires" comme mode de gestion des entreprises. C’est à lui que la direction de l’UTP a fait appel pour diriger les négociations avec les organisations syndicales en vue de détruire la Convention collective nationale des salariés des entreprises de transports publics. Cet expert est payé pour valider les plans de la direction ou trouver des "solutions alternatives" puisées dans l’arsenal de B.Bruhnes : mise en cause des acquis ouvriers, baisse de la valeur de la force de travail au nom du "sauvetage" de l’emploi.

Pour le conseiller de Matignon, "adopter une autre démarche", c’est rechercher des solutions alternatives négociées c’est à dire amener les organisations syndicales à négocier pour faire passer les plans contre les travailleurs. Pour le gouvernement la question de Renault est essentielle. En mai, au moment où la direction de Renault annonçait 5864 licenciements, le secrétaire de la fédération FO de la métallurgie expliquait :

"En France l’automobile devrait perdre 9000 emplois cette année, 11 000 en 1998 et 40 000 en six ans. Les constructeurs nous ont averti qu’il y avait 114 000 salariés dans les usines de montage et qu’il n’y en aurait plus que 85 000 en 2002". Si les travailleurs de Renault gagnaient sur leurs revendications (aucun licenciement, aucune suppression d’emploi), ce serait un point d’appui pour l’ensemble de la classe ouvrière à commencer par les travailleurs du groupe PSA dont le PDG vient d’annoncer 1200 licenciements. Pour le gouvernement "l’autre démarche" concoctée pour Renault doit avoir une valeur d’exemple.

LES PRIVATISATIONS

La question des privatisations dont le processus a été engagé par le gouvernement Chirac-Juppé est un autre problème épineux pour le gouvernement Jospin. Il s’agit entre autre des privatisations de Thomson-CSF, de celle d’Air France, de l’ouverture du capital de France-Télécom, de la poursuite de la réforme de la SNCF. Le capital financier exige la poursuite et l’achèvement du processus de privatisation.

Durant la campagne électorale, L.Jospin a affirmé "ni nationalisation, ni privatisation", alors que F.Hollande, porte-parole du PS, prônait le "pragmatisme". En effet, pour le gouvernement, ne pas privatiser, c’est se priver de recettes non négligeables pour atténuer le déficit budgétaire. Mais cela implique la liquidation du statut et des garanties collectives des travailleurs de ces secteurs et donc l’affrontement avec les salariés. Cela va contraindre le gouvernement de Jospin à rechercher un accord avec les appareils syndicaux : ce sera aux dirigeants de ces organisations de faire passer la liquidation des statuts par la négociation.

Ceci dit, la question demeure : les dirigeants syndicaux ont-ils les moyens de faire passer cette politique ? Pour les travailleurs plus que jamais, l’exigence est :

LA CRISE DANS LE RPR ET L’UDF

Après les résultats du 1er juin, à l’UDF et au RPR, les couteaux ont été tirés. L’UDF n’est plus contrôlée par Léotard. Madelin lui succède à la tête du Parti républicain et Bayrou prend la direction du groupe à l’Assemblée nationale. Son parti, Force démocrate (ex-CDS) est le mieux représenté au sein de la confédération bourgeoise. L’objectif de Bayrou est de reconstituer un parti bourgeois dans la lignée du catholicisme social : son parti est l’héritier du M.R.P. (Mouvement républicain populaire) parti démocrate-chrétien créé à la Libération (parti bourgeois clé de voûte du tripartisme et des gouvernements d’union nationale sous la IVème République).

C’est au sein du RPR que le séisme est le plus important : le RPR est le parti gaulliste, le parti de la Vème République, le parti traditionnel du Bonaparte. Chirac est politiquement affaibli. D’ores et déjà, Seguin a expulsé Juppé contre la volonté de Chirac, ce qui constitue pour ce dernier un échec supplémentaire. En même temps, le RPR, quelles que soient les aspirations de Seguin à succéder à Chirac, se doit d’aider le Président de la République dans la perspective d’expulser à une autre étape, la majorité PS-PCF à l’Assemblée nationale. Quant à Pasqua, il est redevenu l’aile marchante qui ouvre la voie à la coopération avec le Front national.

Le Front national n’est pas un parti fasciste (ses effectifs sont réduits, il n’utilise pas de troupes comme les SA en Allemagne, les chemises noires en Italie lesquelles avaient engagé le combat pour détruire physiquement les mouvements ouvriers). Mais le FN a développé au cours de la campagne électorale une politique anti-immigrés, une politique aux traits fascisants. Dans ces élections, le FN s’est renforcé. De 2,7 millions de voix en 1986, il est passé à 2,3 millions en 1988, à 3,1 millions en 1993 et à 3,7 millions en 1997 (soit un peu plus que l’UDF et seulement 12% de moins que le RPR). Il exerce donc un poids politique et entend peser dans la recomposition politique des partis bourgeois.

L’UDF et le RPR font les plus mauvais scores de leur histoire. Ils sont en crise, le RPR surtout. Mais ils n’ont pas disparu. Les positions qu’ils occupent à l’Assemblée nationale, dans l’appareil d’État et dans l’ensemble du pays sont très importantes. Un processus de réorganisation est en cours dans le RPR, l’UDF, et aussi, dans une certaine mesure, au FN. Il se développera en fonction des besoins de la bourgeoisie française mais aussi en rapport avec les contradictions qui divisent celle-ci et selon les rapports entre les classes.

LE GOUVERNEMENT JOSPIN : UN GOUVERNEMENT DE TYPE FRONT POPULAIRE,
UN GOUVERNEMENT INSTABLE

Les résultats du vote aux élections législatives montrent à la fois la volonté de la classe ouvrière de chasser le gouvernement Chirac-Juppé, la majorité RPR-UDF et en même temps les limites de ce vote. Au premier tour, le PS et le PCF rassemblent 8 969 786 voix soit 2,1 millions de plus qu’en 1993, mais 2,2 millions de moins qu’en 1988, 2,6 millions de moins qu’en 1986 (alors qu’ils avaient perdu les élections); 4,4 millions de moins qu’en 1981 et 3,3 millions de moins qu’en 1978. En 1997, les votes pour le PS et le PCF représentent 66% de leur électorat de 1981 et 72% de celui de 1978. Il est vraisemblable que si la classe ouvrière et la jeunesse ont à nouveau voté pour les partis ouvriers, une fraction plus ou moins importante de la petite bourgeoisie a basculé du côté du Front national.

Le RPR, l’UDF et les divers droite ont 9 160 402 voix. Ils perdent 2,9 millions de voix par rapport à 1993, 743 000 voix par rapport à 1988, 3,4 millions par rapport à 1986, 1,6 millions par rapport à 1981, 4,9 millions par rapport à 1978. Mais l’ensemble des partis bourgeois, RPR, UDF et Front national sont majoritaires avec 51% des exprimés. S’ils perdent 2,4 millions de voix par rapport à 1993, ils en gagnent 700 000 par rapport à 1988 (alors qu’ils étaient battus), ils perdent 2,3 millions de voix par rapport à 1986 mais ont 2 millions de voix de plus qu’en 1981. (En dehors de 1986, le nombre des exprimés par rapport aux inscrits est sensiblement le même).

Ayant reconnu les prérogatives du président de la République, Jospin a soumis à son avis le choix des ministres pour les postes "sensibles" (armée, affaires étrangères...) Il a fait entrer dans son gouvernement des représentants d’organisations étrangères au mouvement ouvrier : Kouchner, Zuccarelli pour l’organisation bourgeoise des Radicaux socialistes (le parti de l’escroc Tapie) résidu du parti radical d’E.Herriot qui fut sous la IIIème République le parti du capital financier. Il a intégré Chevènement pour le Mouvement des citoyens (organisation nationaliste jusqu’au chauvinisme).

Après avoir permis l’élection de députés Verts au détriment de candidats du PS il a inclus, dans son gouvernement, D.Voynet qui défend ouvertement le mode de production capitaliste. Dans son livre-programme publié à l’occasion des élections présidentielles de 1995, D.Voynet fait l’apologie de "l’économie solidaire", nouvelle appellation du "partage du travail" : elle propose par exemple que les cotisations de chômage soient utilisées pour financer des "entreprises solidaires", offrant aux chômeurs des "emplois de proximité" ; une baisse des salaires réels ; la cogestion à tous les niveaux, rebaptisée "éco-gestion" ! Les Verts reprennent les thèmes fondamentaux du christianisme social, ceux de l’association capital-travail.

La plupart des députés PRS, MDC, Verts doivent leur élection au fait que le PS et le PCF ont retiré leurs propres candidats dès le premier tour. Ces partis ont constitué un groupe à l’Assemblée nationale dont l’intitulé en définit la nature : Radical Citoyen Verts. Ils ont opposé leur propre candidat à celui du PS et du PCF à la présidence de l’Assemblée nationale. Leur présence au gouvernement garantit qu’en aucun cas, il ne sera touché au mode de production capitaliste qui est à l’origine de tout ce qui frappe le prolétariat.

Dans tous les domaines, la défense du mode de production capitaliste, la défense des intérêts de l’impérialisme français en crise va conduire le gouvernement que dirige Jospin à reprendre d’une manière ou d’une autre la politique anti-ouvrière des gouvernements précédents (quitte à relancer les déficits et l’inflation). La structure resserrée de ce gouvernement indique d’ores et déjà des axes politiques : Martine Aubry dirige un vaste ministère qui inclut "l’emploi" (et non le travail) et la "solidarité" ; elle fut le bras droit de Gandois à la tête de Péchiney, "stage très utile" pour une collaboration avec l’actuel président du CNPF. La remise en cause des statuts nationaux des fonctionnaire, la polyvalence, la flexibilité sont inclus dans l’intitulé du "ministère de la Fonction publique, de la réforme de l’État et de la décentralisation.

Cela dit, le gouvernement de coalition que dirige Jospin est incapable d’apporter des solutions à la crise de la bourgeoisie française. Ce gouvernement de type Front populaire délavé mis en place à la suite de la défaite de Chirac et se soumettant au président battu est nécessairement un dispositif fragile et instable. Les initiatives que prendront la classe ouvrière et la jeunesse contre la politique qu’inévitablement mènera ce gouvernement seront un élément décisif du développement de cette crise.

À BAS LA PARTICIPATION, À BAS LA COGESTION
"L’INTERVENTION CITOYENNE" : UN COMBAT POLITIQUE CONTRE LE PROLÉTARIAT

Plus que jamais, les organisations syndicales CGT, FO, FSU, SE-FEN, UNEF-ID, UNEF-SE ont un rôle irremplaçable à jouer. Impossible d’appliquer une politique de défense de la bourgeoise française si les dirigeants des centrales syndicales ne coopèrent pas avec le gouvernement et le patronat.

À la fin de l’année 1995, une nouvelle impulsion a été donnée à la "concertation" et à la "participation", vers la "cogestion". Cette orientation a été officialisée par le 45ème Congrès de la CGT qui s’est tenu au moment où la grève déferlait. Elle se traduit par le fait que les dirigeants syndicaux reprennent à leur compte et mettent en avant les revendications patronales en les faisant passer pour des revendications ouvrières.

Cette orientation cogestionnaire qui soumet la classe ouvrière à la bourgeoisie, vise à leur interdire le combat en défense de ses intérêts de classe et conduit à la destruction des organisations ouvrières (en particulier des syndicats), à l’atomisation de la classe ouvrière comme classe.

Le PCF, lors de son 29ème Congrès a largement développé cette "orientation citoyenne" : "il faut dépasser le capitalisme" ; les rapports d’association, de coopération (...) sont devenus des exigences majeures". Contre le Front unique des organisations ouvrières se situant sur un terrain de classe, le PCF prône l’association Capital-Travail, la cogestion à tous les niveaux. Ce sont là les valeurs du christianisme social qui exigent de la classe ouvrière de nouveaux sacrifices ("le partage") pour que le système capitaliste perdure.

Cette orientation est aussi celle du PS : "Créer une nouvelle méthode pour une autre dynamique sociale". Il s’agit d’arrimer encore plus les dirigeants des syndicats à l’appareil d’État. C’est ce qui fonde la "méthode" du premier ministre Jospin. Il a proposé aux dirigeants des organisations syndicales une vaste "Conférence nationale sur les salaires, l’emploi et la durée du temps de travail". Une réduction du temps de travail serait proposée, mais étalée sur des années et négociée branche par branche, entreprise par entreprise. Or, la classe ouvrière a toujours combattu pour que la durée du temps de travail soit fixée par une loi claire, la même imposée à tous les patrons, sur une base quotidienne et hebdomadaire fixe. En outre, seraient généralisées l’annualisation du temps de travail et la flexibilité. Les gains ainsi obtenus par les patrons compenseraient de très loin une maigre baisse du temps de travail.

Mettre en échec ces projets implique d’imposer aux dirigeants syndicaux qu’ils boycottent cette conférence :

Il est nécessaire d’adresser aux dirigeants des centrales syndicales FO, CGT, FSU, SE-FEN, UNEF-ID, UNEF-SE, des fédération et des syndicats la revendication : "Rompez avec la bourgeoisie". " Ne siégez dans aucun organisme de participation, boycottez-les, organisez leur boycott". À cette revendication est immédiatement associée celle de : "Réalisez immédiatement le Front unique à tous les niveaux pour engager le combat pour les revendications".

POUR UN GOUVERNEMENT DU PS ET DU PCF
SANS MINISTRE MEMBRE D’ORGANISATIONS BOURGEOISES

Très vite, la population ouvrière et la jeunesse vont se heurter à la politique de ce gouvernement défendant les intérêts de la bourgeoisie. La rupture des centrales syndicales avec la bourgeoisie, leur boycott de la participation, la réalisation du Front unique à tous les niveaux, l’engagement de véritables et authentiques mouvements par d’importants secteurs de la classe ouvrière poseraient la question de la rupture du PS et du PCF d’avec la bourgeoisie, de chasser Chirac, d’en finir avec les institutions réactionnaires de la Vème République, d’imposer un gouvernement PS-PCF sans ministre représentant la bourgeoisie : ouvrir une issue politique à la classe ouvrière et à la jeunesse c’est formuler cette revendication première des masses adressée aux dirigeants du PS et du PCF.

Après la défaite de Chirac, la classe ouvrière et la jeunesse ne peuvent qu’exiger :

- Abrogation de la Réforme Juppé de destruction de la Sécurité sociale, de tous les décrets Juppé, dont les décrets Barrot Juppé publiés le 1er juin et organisant la fermeture de services hospitaliers.

- Rétablissement de la retraite, pour tous, avec 37,5 annuités !

- Abrogation de la loi quinquennale sur l’emploi !

- Abrogation de la loi Thomas instituant les fonds de pension : aucun fonds de pension !

- Abrogation de la réforme Bayrou des collèges !

- Abrogation de la réforme Bayrou des Universités !

- Abrogation de la loi Perben

- Abrogation des lois Debré-Pasqua !

- Annulation immédiate de toutes les suppressions de postes dans la Fonction publique, rétablissement de tous les postes aux concours, embauche massive sur de vrais postes fixes, dans le respect des statuts !

- Annulation de tous les licenciements (de tous les "plans sociaux") et pour commencer : à Renault (à Renault Vilvoorde comme à Renault France)

- Aucune privatisation, ni totale ni partielle ; rétablissement du statut initial de fonctionnaires à France-Télécom et à la poste et abrogation du texte transformant celle-ci en société anonyme. Réunification des PTT Abrogation du R.F.F. (Réseau Ferré Français).

POUR UN PLAN DE PRODUCTION FONDÉ SUR LA SATISFACTION DES BESOINS DES MASSES

Aucune liste de revendications n’est exhaustive. Mais aucune charte revendicative n’est valable si n’y figure pas l’aspiration et l’exigence pressante de la population laborieuse et de la jeunesse : en finir avec la crise et le chômage. La cause du chômage, c’est le mode de production capitaliste. Aucune revendication importante de la classe ouvrière et de la jeunesse ne peut être satisfaite dans le cadre du mode de production capitaliste. Au contraire tout gouvernement qui défend ce régime doit agir pour réduire au minimum la valeur de la force de travail, réduire le pouvoir d’achat des masses, précariser au maximum leurs conditions de travail et d’existence, détruire l’ensemble des acquis ouvriers.

La classe ouvrière, la population laborieuse devront combattre pour imposer :

L’échelle mobile des heures de travail implique la réduction massive du temps de travail à hauteur de ce qui est nécessaire afin que la masse des chômeurs retrouve un emploi tout en maintenant l’ensemble des acquis (maintien des salaires réels, maintien des acquis garantis par les statuts nationaux, des conventions collectives nationales, maintien du calcul hebdomadaire de la durée du travail, un seul contrat le CDI, aucune flexibilité).

Ces revendications mettent en cause le régime capitaliste. leur satisfaction exige de réorienter la production en fonction des besoins des masse et non plus du profit particulier, c’est pourquoi il est nécessaire que soit élaboré un plan de production fondé sur la satisfaction des besoins des masses

Pour cela, il faut s’adresser aux organisations syndicales (CGT, FO, FSU, SE-FEN) au PS, au PCF afin que, pour lutter contre le chômage, pour le droit au travail, elles convoquent et organisent

une conférence nationale ouvrière

Le rôle d’une telle conférence serait d’évaluer les besoins et de commencer à élaborer un tel plan répondant aux besoins des masses et appliqué sous contrôle ouvrier.

Cette conférence de délégués ouvriers élus par des assemblées générales d’usines, de bureaux, d’écoles...réunis avec les responsables syndicaux et politiques dresserait le bilan des besoins et des ressources, poserait nécessairement la question du pouvoir ouvrier, de l’expropriation du capital, du contrôle ouvrier et apporterait les réponses politiques permettant de s’engager dans cette voie.

SEUL LE PROLÉTARIAT PEUT UNIFIER L’EUROPE

Dans la déclaration qu’il a publiée avant les élections législatives, déclaration titrée Faire tout ce qui est possible pour vaincre Chirac le Comité expliquait :

" Il n’y a pas d’Europe unie. Le capitalisme allemand reste le capitalisme allemand, le capitalisme français, le capitalisme français. " l’Union européenne" est une construction qui, si importante soit-elle, n’est pas durable. Dans le cadre du mode de production capitaliste, l’Europe ne peut être unifiée. Tout s’y traite en fonction des rapports de force entre les impérialismes. " L’Union européenne" n’est pas durable :

" C’est dans ce sens que les organisations ouvrières (partis et syndicats) devraient mener le combat. Mais elles se divisent en partisans et en adversaires de "l’Union européenne", de la "monnaie unique", du traité de Maastricht, les unes et les autres veulent défendre les intérêts de la "France" (lire :du capitalisme français).

" La solidarité entre les prolétariats des différents pays est indispensable. Celle des prolétariats des puissances impérialistes avec les peuples et les prolétariats des pays coloniaux est un impératif catégorique.

" Le Comité pour la construction du parti ouvrier révolutionnaire intervient et agit politiquement au nom exclusivement des intérêts du prolétariat. C’est pourquoi, il dénonce "l’Union européenne", la "monnaie unique", le traité de Maastricht.

" Mais la lutte des classes du prolétariat est nationale dans sa forme, internationale dans son contenu. Chaque prolétariat national doit prendre le pouvoir dans son pays. Mais on ne construit pas "le socialisme dans un seul pays". Le prolétariat prenant le pouvoir dans un pays quelconque d’Europe, et notamment en Allemagne et en France, donnerait une formidable impulsion aux prolétariats des pays européens qui seraient incités à prendre le pouvoir. Les prolétariats d’Europe ont un besoin brûlant d’une Europe réellement unie. Seuls ils sont en mesure de la constituer. C’est pourquoi, sur les drapeaux rouges des prolétariats d’Europe, doit être inscrit :
VIVE LES ÉTATS-UNIS SOCIALISTES D’EUROPE ! "

CONSTRUIRE UN PARTI OUVRIER RÉVOLUTIONNAIRE

C’est parce qu’ils sont attachés au régime capitaliste que le PS, le PCF, les appareils syndicaux reconnaissent les prérogatives du Président battu, Jacques Chirac, et se soumettent aux institutions réactionnaires de la Vème République. C’est pour les mêmes raisons que le PS et le PCF ont constitué avec des organisations bourgeoises et petites-bourgeoises réactionnaires un gouvernement de type Front populaire. Sa fonction essentielle est de faire barrage à la mobilisation des masses, de les faire refluer afin de permettre à la bourgeoisie et à ses partis de tenter de surmonter leur crise.

La défaite de Chirac, du RPR, de l’UDF a bouleversé la situation. Obligatoirement, les masses chercheront à utiliser l’existence d’une majorité PS-PCF pour exiger la satisfaction de leurs revendications. En imposant le Front unique des organisations ouvrières, la rupture avec la bourgeoisie, le prolétariat et la jeunesse peuvent remporter d’importantes victoires politiques, imposer que Chirac soit chassé ; le combat pour un gouvernement PS-PCF leur offre une perspective politique. Cependant le Comité ne sème aucune illusion : même s’ils étaient contraints de former un gouvernement sans ministre bourgeois, le PS et le PCF ne changeraient pas de nature. Ils ont depuis longtemps fait allégeance au mode de production capitaliste et se prononcent ouvertement aujourd’hui contre le "socialisme" contre le "communisme".

Mais aucun gouvernement ne satisfera durablement les revendications de travailleurs, ne sera véritablement un gouvernement ouvrier s’il ne s’attaque au régime capitaliste déliquescent, à l’État bourgeois et s’il ne s’appuie sur le prolétariat regroupé et organisé comme classe dans ses propres organismes. La tâche d’un véritable gouvernement ouvrier serait d’exproprier, sans indemnités ni rachat, la bourgeoisie de la possession des moyens de production, des banques, des établissements de crédit, de la grande distribution, des moyens de transport etc....de les étatiser, de faire en sorte que sous le contrôle de la classe ouvrière soit élaboré et réalisé un plan de production visant à satisfaire les besoins des masses. Il ne peut y avoir d’issue à la crise de la société bourgeoise qu’en combattant pour le socialisme.

Pour imposer des solutions ouvrières à la crise, il faut construire un Parti ouvrier révolutionnaire, une Internationale ouvrière révolutionnaire : l’expérience a montré que le prolétariat ne peut prendre le pouvoir et s’y maintenir que si, dans la lutte de classes, de façon consciente systématique et organisée, est construit un Parti ouvrier révolutionnaire. Il ne s’agit pas de n’importe quel type de parti, mais d’un parti de type bolchevique, du type de celui de Lénine et de Trotsky, sans lequel la Révolution d’Octobre n’aurait pu être victorieuse. C’est un tel parti que le Comité entend construire. Ce combat est indissolublement lié aux réponses politiques dont le prolétariat et la jeunesse ont besoin au moment présent.

Le 13 juin 1997




DÉBUT                                                                                                        SOMMAIRE - C.P.S N°68 - 13 JUIN 1997