8 février 2003 - Supplément à «Combattre pour le socialisme» n°91 :



À BAS LA GUERRE IMPÉRIALISTE CONTRE L’IRAK

PAS UNE ARME, PAS UN SOLDAT CONTRE L’IRAK,

À bas toutes les résolutions de l’ONU qui organisent l’embargo, permettent les bombardements, ouvrent la voie à la guerre impérialiste
et à la transformation de l’Irak en protectorat!


Depuis des mois, le gouvernement américain accumule, dans le Golfe persique et autour de l’Irak, d’énormes moyens militaires. Fin janvier, plus de 100 000 soldats américains étaient déjà en position, appuyés par une formidable armada. Le gouvernement anglais n’est pas en reste : une partie de la Royal Navy fait route vers le Golfe. Quant au gouvernement français, il a fait savoir que le porte avions Charles de Gaulle serait prêt.

Officiellement, il s’agit d’en finir avec la menace militaire que représenterait le régime de Saddam Hussein. Mais l’armée irakienne a été brisée en 1991. L’économie est asphyxiée par l’embargo depuis plus de dix ans et les bombardements anglo-américains (effectués avec l’aviation française dans un premier temps) n’ont pas cessé.

Crise du capitalisme et guerre impérialiste.

En janvier 2000 encore, cette situation " semblait convenir à tout le monde", comme l’expliquait un quotidien patronal en précisant que " les américains ne paraissaient pas disposés à bouger sur le dossier irakien dans une année électorale." ( Les Échos, 21 janvier). Mais alors, la situation économique des États-Unis paraissait florissante. Au printemps 2001, cette situation s’est modifiée avec le surgissement de la crise économique et financière, crise dont les premières manifestations sont le krach boursier, la chute des investissements, la hausse du chômage.

Pour tenter de surmonter cette crise, Bush prépare la guerre : la relance de l’industrie d’armement, l’accaparement des ressources pétrolières au bénéfice exclusif des trusts américains, la baisse des salaires qu’une situation de guerre permet d’imposer à la classe ouvrière, sont autant de moyens visant à rétablir les profits du capital.

Les attentats du 11 septembre 2001 lui ont donné l’occasion attendue depuis des mois : ce fut d’abord l’intervention américaine (avec l’appui des autres impérialismes) en Afghanistan. C’est désormais la guerre contre l’Irak qui se prépare. Au-delà de la question du pétrole, c’est un objectif d’ensemble qu’il s’agit, un objectif militaire, politique et économique qui vise à réorganiser tout le Proche et Moyen-Orient.

DES PLANS PRÉPARÉS DE LONGUE DATE.

Dès janvier 1998, un groupe de 18 dirigeants américains liés au parti républicain proposait, dans une lettre ouverte à Clinton, de " renverser le régime de Saddam Hussein ". Avec la nomination de Bush comme président, nombre de ces hommes font partie de l’actuel gouvernement, tels Donald Rumsfeld (numéro 1 du Pentagone) ou Richard Peile, responsable du " Defence Policy Board ". Laurent Murawice, proche de Richard Peile, explique ainsi : " la raison profonde de la guerre, c’est de mettre fin à la structure de la région, héritée de la Pax Britannica, et qui ne fait que produite des effets délétères depuis 1956. Pour y parvenir, il faut commencer par Bagdad." Ce plan visait ainsi, par la guerre, à assujettir tous les régimes de la région et à mettre fin à toute résistance du peuple palestinien.

LA RÉSOLUTION 1441 DE L’ONU, SELON LES BESOINS DE L’IMPÉRIALISME AMÉRICAIN.

Le 8 novembre 2002, le Conseil de Sécurité de l’ONU, à l’unanimité de ses membres – dont le représentant du gouvernement Chirac – a voté une résolution qui donne mission aux inspecteurs de l’ONU de fouiller chaque recoin de l’Irak. Tous les gouvernements, dont le gouvernement français, se sont ralliés à l’exigence américaine de renforcer la tutelle impérialiste sur l’Irak. George Bush, quant à lui " se réserve le droit " d’apprécier si le gouvernement irakien satisfait aux objectifs fixés. Le 11 octobre, le Congrès américain, avec l’appui de parti démocrate, lui avait d’ailleurs donné le droit " d’utiliser la force armée comme il le juge nécessaire et approprié. "

Le 6 février, devant le Conseil de sécurité, Collin Powell a apporté une nouvelle preuve…que le gouvernement américain voulait la guerre.

À PROPOS DU PACIFISME.

Parmi les différentes " voix " qui, aux États-Unis, s’élèvent contre la guerre, il convient de distinguer. Certains cercles de la bourgeoisie américaine préfèreraient éviter la guerre, non par "état d’âme" à l’égard de la population irakienne victime de l’embargo et des bombardements, mais parce qu’ils redoutent que la guerre accélère la crise économique au lieu de la repousser et qu’elle soit ultérieurement préjudiciable aux intérêts américains. Ces bonnes âmes impérialistes sont relayées par des organisations religieuses et des artistes liés à des fractions du parti démocrate. Certains d’entre eux, dans un appel intitulé " Artistes Unis pour gagner sans guerre", expliquent : " nous sommes des patriotes américains, nous pensons que Saddam Hussein ne doit pas être autorisé à avoir des armes de destruction massive. Nous soutenons les inspections rigoureuses des Nations Unies pour assurer le désarmement effectif de l’Irak. Cependant, une invasion préventive militaire de l’Irak nuirait aux intérêts de l’Amérique", elle "risque (…) de fragiliser notre économie."

De ces " patriotes ", les travailleurs et les jeunes américains qui veulent combattre contre leur propre impérialisme n’ont rien à attendre. Cette aspiration à combattre s’exprime déjà avec netteté dans le mouvement ouvrier américain, dans les positions de sections syndicales, par exemple celle des 20 000 teamsters (camionneurs) de Chicago. L’enjeu de cette mobilisation c’est d’imposer à la direction de l’AFL-CIO une prise de position contre la guerre impérialiste, et l’organisation, par le syndicat, du boycott du transport des troupes et matériels.

PACIFISME ET IMPÉRIALISME FRANÇAIS.

Face aux exigences américaines, le gouvernement français manœuvre pour défendre les intérêts de la bourgeoisie française. Celle-ci redoute de ne jamais retrouver, en Irak, les marchés qui furent les siens, de se faire expulser définitivement de la région par l’impérialisme américain. Mais ses réticences ne l’ont pas empêché, le 30 décembre, de voter une nouvelle résolution du Conseil de sécurité qui accroît la liste des produits soumis à l’embargo : y figurent les camions de plus de vingt tonnes … et des médicaments ! Seules s’abstenaient la Syrie et la Russie.

Le 6 février, au Conseil de sécurité, le gouvernement français a proposé de surseoir à cette guerre en triplant le nombre d’inspecteurs. Il prépare avec l’Allemagne un plan pour l’occupation " sans guerre " de l’Irak par des troupes impérialistes casquées de bleu. Sur le fond, l’orientation du PS et du PCF, des dirigeants des organisations syndicales et des pacifistes divers n’est guère différente : ils font tout pour camoufler qu’il s’agit d’une guerre " impérialiste ". À l’inverse, l’internationalisme prolétarien impose de dire :  - droit à la souveraineté de l’Irak !

- soutien au peuple irakien !

Le PCF fait signer un appel à Chirac pour un " veto français " au Conseil de sécurité de l’ONU, comme si un gouvernement qui défend les intérêts des capitalistes français prêts à investir en Irak pouvait se situer en défense du peuple irakien ! Faut-il ajouter que ce soutien au gouvernement Chirac s’accompagne d’un soutien à l’intervention impérialiste française en Côte d’Ivoire ; cette intervention, avec des moyens plus réduits, n’est pas de nature différente de celle de l’impérialisme américain en Irak.

En réalité, alors que la responsabilité des dirigeants du PS, du PCF et des organisations syndicales, serait d’être totalement solidaires du peuple irakien face à la guerre impérialiste, d’organiser la mobilisation en défense de l’Irak contre cette guerre, d’exiger le retrait de tout navire français, à l’inverse ils aident Chirac à manœuvrer face à l’impérialisme américain. Ce soutien se concrétise par l’accord selon lequel il faudrait désarmer l’Irak. Il en est de même de groupes tels la LCR. Son affiche, titrée " nos vies valent mieux que votre pétrole " est explicite : car chacun sait que si des professionnels américains (et, peut-être anglais et français) peuvent être tués dans une telle guerre, ce seront par dizaines de milliers que des irakiens –travailleurs et jeunes enrôlés à l’armée et civils de tous âges – vont se faire massacrer par les armées impérialistes. Ce que disent Besancenot et son mentor Krivine avec cette affiche, c’est que " nos vies " -qui ne craignent guère- sont plus importantes que les peuples écrasés par l’impérialisme!

FRONT UNIQUE CONTRE LA GUERRE IMPÉRIALISTE !

Combattre la guerre impérialiste est une nécessité. Ceci implique de rompre tout soutien à Chirac, tout soutien à notre propre impérialisme, et de rejeter l’ensemble des résolutions de l’ONU. La première responsabilité des dirigeants des organisations ouvrières, c’est de se prononcer contre la guerre impérialiste et toute forme d’intervention impérialiste :

Sur cette base peut et doit être organisé tout combat réel, toute manifestation. Le combat contre toute intervention impérialiste implique également que les organisations du mouvement ouvrier se prononcent pour le retrait des troupes françaises de Côte d’Ivoire et contre la résolution de l’ONU plaçant la Côte d’Ivoire sous tutelle.