Supplément à C.P.S. n° 91, 22 janvier 2003 :



FRONT UNIQUE DES ORGANISATIONS SYNDICALES (CGT, FO, FSU)

CONTRE LA RÉFORME GOUVERNEMENTALE DES RETRAITES

Défense inconditionnelle du code des pensions de la Fonction Publique et des régimes spéciaux


UNE " RÉFORME " DES RETRAITES POUR BAISSER LE PRIX DE LA FORCE DE TRAVAIL.

À en croire le gouvernement et les " experts " du capital, il y aurait urgence à réaliser la " réforme " des retraites. La raison en serait démographique, à savoir le déséquilibre des générations, le rapport entre travailleurs salariés (qui paient les cotisations) et les retraités. Il s’agit là d’une entreprise d’intoxication des travailleurs.

Au moment où gouvernement et patronat visent à accréditer cette thèse, se multiplient les plans de licenciements massifs (Bull, Daewoo, Metaleurop) jetant à la rue des travailleurs de tous âges. Cinq millions et demi de travailleurs sont soit au chômage, soit en temps partiel contraint. Après les Contrats Emplois Jeunes, la loi instaurant les" Contrats Jeunes " offre aux patrons des milliers de jeunes pour lesquels ils ne paieront aucune charge sociale (et par conséquent aucune cotisation retraites). La même loi du profit pousse capitalistes et gouvernement à jeter des centaines de milliers de travailleurs au chômage d’un côté, à exploiter de plus en plus tard des centaines de milliers de l’autre, à exempter les patrons du paiement de ce salaire différé qu’est la retraite des vieux travailleurs.

Ce n’est pas parce qu’il serait impossible de produire les richesses suffisantes pour assurer une existence décente aux vieux travailleurs que le gouvernement liquide le régime des retraites. C’est pour assurer la survie du régime capitaliste. Car dans la société capitaliste, les limites de la production, loin d’être déterminées par les besoins des masses, le sont par la possibilité de réaliser du profit. Voilà pourquoi aux États-Unis, au Japon on contraint les travailleurs à la tâche jusqu'à 70 ans. Voilà pourquoi le gouvernement Blair vient d’imposer l’âge minimum de 65 ans.

" FAIRE SAUTER LE VERROU DE LA FONCTION PUBLIQUE " (le Medef)

Pour pouvoir faire passer l’ensemble des travailleurs à 42 annuités, voire davantage, le gouvernement doit d’abord liquider les régimes spéciaux et le code des pensions de la Fonction Publique d’État. Le code des pensions n’est ni un régime par capitalisation, ni un régime par répartition. Dans un régime par capitalisation, le travailleur verse à un organisme financier une partie de son salaire. Cette somme est placée (en actions ou obligations), et il touchera sa pension si... les actions rapportent. Que le placement soit individuel, qu’il soit un placement collectif, qu’il soit un placement à l’échelle de l’entreprise, le principe - et les aléas - sont identiques. Le travailleur est à la merci d’un krach boursier ou de l’effondrement des cours des actions comme l’a montré notamment ce qui s’est passé à Enron aux États-Unis. L’objectif final de la bourgeoisie est la généralisation de la capitalisation à la totalité des retraites.

Dans un régime par répartition, les cotisations retraites (qui sont un salaire différé) sont aussitôt reversées aux retraités. Ainsi la cotisation retraite est en réalité une partie du salaire versé par la bourgeoisie au prolétariat dans son ensemble. Bien entendu, la bourgeoisie combat pour diminuer et, à terme, faire disparaître un tel versement. Mais dans la Fonction Publique d’État, l’État s’engage à verser au fonctionnaire en retraite une pension jusqu'à son décès. La somme allouée aux pensions des fonctionnaires est " budgétisée ". Ainsi pour les fonctionnaires, le versement de la pension n’est pas subordonné à l’équilibre d’une caisse de retraite. Il y a là une garantie insupportable aux yeux du capital et du gouvernement à sa solde. Voilà pourquoi, selon le MEDEF, il faut " faire sauter le verrou de la Fonction Publique "

C’est au nom de l’" équité " qu’une telle offensive se mène. Mais personne ne peut être dupe : ce n’est sûrement pas pour réparer une injustice à l’égard des travailleurs du privé que le gouvernement entend liquider le code des pensions. C’est le contraire : s’attaquer au code des pensions est une première étape pour s’attaquer demain à tous les retraités. La défense du code des pensions de la Fonction Publique est donc une question vitale pour l’ensemble du prolétariat et pas pour les seuls fonctionnaires. Que le gouvernement échoue dans son offensive, que le code des pensions et les régimes spéciaux soient préservés, cela signifierait que les conditions seraient réunies pour en finir avec ce gouvernement, pour la constitution d’un gouvernement des organisations ouvrières. D’un tel gouvernement, les travailleurs exigeraient immédiatement le retrait du décret Balladur, le rétablissement des 37,5 annuités pour tous, l’indexation des retraites sur les salaires, et le paiement à 75% sur les bases des dix meilleures années

FRONT UNIQUE DES ORGANISATIONS SYNDICALES POUR LA DÉFENSE DES ACQUIS.

Voilà pourquoi la seule base possible de l’unité syndicale, c’est la défense inconditionnelle des acquis :

La déclaration commune des directions syndicales du 6 janvier tourne le dos aux revendications. Les directions des confédérations CGT et FO, celle de la FSU ont contresigné avec la CFDT, la CFTC et l’UNSA une déclaration sur les retraites. A aucun moment, elle ne se situe en défense des acquis. La seule référence aux annuités nécessaires pour bénéficier du départ à taux plein - sans que nulle part, il soit précisé quel est ce " taux plein "- est de 40 annuités. Il n’est dans cette déclaration question ni du code des pensions, ni des régimes spéciaux C’est l’alignement des syndicats ouvriers sur les positions de la très patronale CFDT qui exige ouvertement le passage à 40 annuités pour tous ceux qui sont encore à 37,5 annuités… Le cadre est d’ailleurs donné par le fait que " face aux évolutions démographiques "…" les organisations syndicales affirment la nécessité d’une réforme ". C’est le terrain même du gouvernement et du MEDEF.

LES TRAVAILLEURS EDF-GDF ONT EXPRIMÉ LA VOLONTÉ DE TOUS LES TRAVAILLEURS.

Les travailleurs d’EDF-GDF à l’encontre de ceux qui prônent " la nécessité d’une réforme " viennent d’exprimer les aspirations de l’immense majorité des travailleurs.

Depuis des mois, les dirigeants de la CGT avec la CFDT, la CFTC, la CGC se concertaient avec la direction pour " adapter " le régime des retraites des électriciens et gaziers à l’ouverture du capital d’EDF, à sa privatisation. De plus, une telle " réforme " devait servir de modèle pour tous les régimes spéciaux et la Fonction Publique. Les directions syndicales, en particulier celle de la CGT avaient rédigé le relevé de conclusion qui instaurait une " caisse de retraite EDF ", adossait le régime EDF-GDF au régime général, bref liquidait le régime spécial EDF-GDF où la retraite est un " salaire d’inactivité " inscrit au compte d’exploitation de l’entreprise - sur le modèle du code des pensions de la Fonction Publique. Mais la direction de la CGT s’est heurté à l’intérieur du syndicat à une forte opposition qui s’est exprimée par des prises de positions de sections syndicales, d’AG. La direction de la CGT allait donc devoir se prononcer contre le relevé qu’elle avait co-rédigé. Elle refusa alors que le syndicat puisse jouer son rôle et organisa un référendum, espérant que les travailleurs approuveraient le relevé de conclusion. La direction de l’entreprise, la CFDT bien sûr... et Cohen, dirigeant de la CGT, menèrent campagne pour le " Oui ". Cette ultime opération échoua, les travailleurs votant massivement " Non ". Ils ont ainsi désavoué la politique des dirigeants syndicaux qui collaborent avec le gouvernement.

Mais le gouvernement persiste car il considère que la " concertation ayant eu lieu ", le projet de loi reprenant le relevé de conclusion rejeté peut être présenté au Parlement. Il indique par là le rôle de la " concertation " avec les dirigeants syndicaux qui doit s’engager de manière imminente : le cadre de cette concertation est celui de l’association des dirigeants syndicaux à l’élaboration de la loi de destruction du code des pensions et des régimes spéciaux.

L’EXIGENCE : AUCUNE PARTICIPATION À LA CONCERTATION DU GOUVERNEMENT !

Ce qui s’est passé à EDF l’indique : la première condition pour la défense des acquis, c’est que les dirigeants syndicaux rompent avec le gouvernement, mettent fin à cette concertation. Les travailleurs devront imposer cette rupture. Rappelons-le : c’est parce que les dirigeants syndicaux ont été contraints de quitter la commission Le Vert mise en place par Juppé en novembre 1995 que les régimes spéciaux et le code des pensions ont été préservés.

Aujourd’hui, alors que le gouvernement fait appel non seulement aux directions syndicales, mais aussi au directions du PS et du PCF -" consultées " elles aussi et qui ont accepté de porter ainsi assistance au gouvernement- c’est à l’inverse pour le combat pour la rupture des organisations ouvrières avec le gouvernement qu’il faut s’organiser. C’est cette organisation que proposent les militants du Comité pour la construction du Parti Ouvrier révolutionnaire, de l’Internationale Ouvrière Révolutionnaire.