29 septembre 2002, supplément à «Combattre pour le socialisme» n°90 :



CONTRE LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE DÉCENTRALISATION
CONTRE LE BUDGET 2003 QUI PRÉPARE SA MISE EN ŒUVRE
FRONT UNIQUE DES SYNDICATS ET PARTIS OUVRIERS
(CGT, FO, FSU, PS, PCF)

Le 16 octobre, le gouvernement rendra public le projet de loi constitutionnelle sur la décentralisation.

Raffarin indique qu’il s’agit de " donner un statut constitutionnel aux régions, de mettre l’accent sur l’autonomie financière des collectivités territoriales, de renforcer leur coopération, d’instaurer un référendum local décisionnel et de préparer les futurs transferts de compétence. "

A partir du 18 octobre, le gouvernement organise des " assises régionales des libertés locales " dans 22 régions. Y sont conviés patrons, élus locaux, associations diverses et responsables syndicaux. La circulaire Sarkozy-Devedjian indique qu’il s’agit de " faire remonter des propositions concrètes " lesquelles, précise Raffarin pourront " varier selon les territoires ".

Devedjan précise dans Les Echos : " En remaniant la constitution, nous allons créer les conditions d’une réforme permanente pour que, à la différence des lois Deferre, la décentralisation puisse avancer indéfiniment. "

S’agissant de l’Éducation, Le Monde indique que le Nord Pas de Calais prendrait la gestion des techniciens et ouvriers de service, que les Pays de Loire veulent gérer l’orientation scolaire, que la plupart réclament la main mise totale sur la formation professionnelle.

Quant à l’Hôpital Public, Raffarin a précisé lors de son intervention télévisée : " Il faut faire prévaloir la responsabilité. Lorsque les collectivités locales financeront l’hôpital elles-même, leurs élus réfléchiront de manière responsable quant il s’agira de décider de la fermeture d’unités de soin ou de lits. "

UNE OFFENSIVE D'UNE VIOLENCE INOUÏE CONTRE LES ACQUIS OUVRIERS.

De quoi s’agit-il ? De porter un coup décisif au droit à l’instruction, au droit à la santé. De liquider toutes les garanties statutaires de la Fonction Publique d’Etat. De tenter de détruire les syndicats comme syndicats nationaux assurant la défense de statuts nationaux et de conventions collectives nationales.

Mettre l’orientation et la carte des formations sous la coupe des collectivités locales, c’est inféoder étroitement la formation aux besoins du patronat, liquider les diplômes nationaux et l’enseignement public, en particulier l’enseignement technique public. C’est remplacer le CAP mécanique automobile par le " diplôme " Franche Comté - Peugeot, le bac technologique par le " diplôme " Auvergne - Michelin.

Créer les Agences régionales de santé, financer les hôpitaux par une " tarification à la pathologie " ainsi que le propose le ministre Mattei, c’est faire dépendre la possibilité de soins des ressources de la région, c’est aligner les travailleurs de l’hôpital public sur les employés des cliniques privés largement plus exploités car privés des garanties du statut national de la Fonction publique hospitalière, c’est pousser l’ensemble des hôpitaux à une course effrénée à l’économie au détriment des malades en supprimant nombre d’examens ou de soins jugés désormais " inutiles ". Cela conduit aussi à la dislocation de la Caisse nationale d’assurance maladie.

Le projet gouvernemental devrait " autoriser les collectivités territoriales (…) à déroger à titre expérimental, aux dispositions législatives et réglementaires ". Sous couvert d’expérimentation, cette " liberté " met à l’ordre du jour la liquidation de la législation en matière de code du travail, la liquidation des conventions collectives nationales dans la droite ligne de la loi Fillon qui fait disparaître par exemple toute réglementation nationale quant à la rémunération des heures supplémentaires. Faire passer telle ou telle catégorie de fonctionnaire sous la tutelle d’une région, d’un département c’est casser l’unité du corps de fonctionnaires d’État de cette catégorie. Cela conduit à liquidation des statuts nationaux.

La classe ouvrière à travers l’histoire a organisé ses syndicats à l’échelle nationale. Elle a créé des fédérations syndicales nationales qui ont combattu pour arracher les conventions collectives, frein à la " libre " exploitation entreprise par entreprise des travailleurs. La loi constitutionnelle en émiettant le droit du travail, en pulvérisant statuts et conventions collectives nationales, vise dans le même mouvement à pulvériser les syndicats nationaux, disloquant de ce fait les capacités de résistance et de combat de corporations entières à l’échelle de l’ensemble du territoire national.

Ce projet s’inscrit dans la droite ligne des objectifs énoncés par de Gaulle dès 1948 : "Au syndicalisme revendicatif, doit succéder un syndicalisme de responsabilité, au syndicalisme d’opposition, un syndicalisme de coopération et d’association. Ce syndicalisme ne doit pas être seulement revendicatif, il doit être un rouage essentiel de notre économie(...) ". Mais, en 1969, l’appel des organisations ouvrières au " double non " (non à de Gaulle, non au projet de réforme de la constitution) interdisait à de Gaulle de mettre en place sa réforme du Sénat et des régions, projet de type corporatiste qui associait les syndicats aux décisions de l’État.

LE BUDGET 2003 PRÉPARE LA MISE EN ŒUVRE DE LA LOI CONSTITUTIONNELLE.

Le budget 2003 est inséparable du projet de loi constitutionnelle. Ainsi dans l’enseignement, les 5 600 suppressions de postes de surveillants sont explicitement liées par le gouvernement à la liquidation du statut des étudiants-surveillants remplacés par des  " agents de proximité " sous la coupe des collectivités locales. Les 800 suppressions de poste au ministère de l’Équipement sont en rapport avec les transferts et privatisations d’activités assurées actuellement par les fonctionnaires de l’Équipement. On ne peut combattre sérieusement le budget sans exiger en même temps le rejet de la loi constitutionnelle sur la décentralisation.

LA RESPONSABILITÉ DES DIRIGEANTS SYNDICAUX, DU PS, DU PCF.

Face à une telle offensive, la responsabilité des dirigeants syndicaux, du PS, du PCF est claire.

La défense du statut de tous les fonctionnaires, la défense de l’Hôpital public, de l’École publique, de la Sécurité sociale exige que se réalise le front unique sur les mots d’ordre suivants :

Il faut corrélativement exiger : aucune suppression de poste, remplacement poste par poste de tous les départs en retraite.

Mais peut-on combattre le projet de loi de décentralisation en participant, ainsi que le proposent Sarkozy-Devedjian à l’élaboration de " propositions concrètes " ? Cette formule sert à masquer l’objectif : dépecer, région par région, tous les acquis ouvriers ! Il faut donc exiger des dirigeants de la CGT, de FO, de la FSU, du PS et du PCF, qu’à l’échelle nationale, ils décident le boycott des " assises régionales pour les libertés locales " !

Dans tous les secteurs, attaques du gouvernement se multiplient. Le 24 septembre, les surveillants étaient appelés à la grève. Le 3 octobre, les travailleurs d’EDF sont appelés à une journée d’action " pour l’emploi ", " pour l’ouverture du débat sur l’évolution d’EDF-GDF ". Le 17 octobre les personnels de l’Éducation nationale sont appelés par la FSU, l’UNSA, la CFDT à la CGT à faire grève pour " d’autres choix budgétaires ".

Mais toutes les attaques contre la classe ouvrière et la jeunesse sont des aspects particuliers d’une même politique. Cette politique se concentre aujourd’hui dans le vote du projet de loi constitutionnelle et du budget 2003. S’organiser pour exiger des dirigeants de la CGT, de FO, de la FSU, qu’ils réalisent le front unique contre ces projets de loi, qu’ils appellent, sur cet objectif, à la manifestation nationale devant l’Assemblée nationale, c’est contribuer à ce que se réalisent les conditions du combat victorieux contre Chirac et son gouvernement.

Force est de constater que l’appel au 17 octobre, par exemple, non seulement ne reprend pas ces mots d’ordre mais les exclut formellement puisque les dirigeants appellent au contraire à " un débat sur les conséquences pour le service public " de la loi de décentralisation.

De même les dirigeants du PS et du PCF soutiennent ladite loi. Hollande déclarait le 4 juillet : " Pour ma part, s’il s’agit de constitutionnaliser une institution comme la région, qui pourrait sérieusement s’y opposer ? ". La direction du PCF entend " participer " à la " décentralisation " qui est " en marche ". Ainsi, dans La Montagne du 20 septembre, le comité régional du PCF d’Auvergne revendique-t-il pour cette région " un véritable droit à l’expérimentation " !Les travailleurs devront combattre pour imposer aux dirigeants syndicaux, au PS, au PCF la rupture avec le gouvernement Chirac, avec le soutien à la loi constitutionnelle.

Le Comité pour la construction du Parti Ouvrier Révolutionnaire appelle les travailleurs à s’organiser sur cet objectif. La réalisation du Front unique des organisations ouvrières (partis et syndicats) contre Chirac et son gouvernement, l’action politique pour que se réalise l’unité de ses organisations ouvre à la classe ouvrière la perspective d’un gouvernement du Front Unique Ouvrier.